mardi 9 avril 2019

Gainsbourg sur le divan (Audrey Tordelli et Joseph Agostini)



À partir d'éléments réels (interviews, faits biographiques...), l'exercice de l'essai à la fois littéraire et psychanalytique est ici poussé jusqu'au bout. Quand il meurt, nu, dans son appartement de la rue de Verneuil le 2 mars 1991, Serge Gainsbourg semble s'être dépouillé de tous ses artifices, de tout ce qui fit Gainsbourg et Gainsbarre, le peintre fou de surréalisme et l'auteur scandaleux de la chanson française, l'amoureux transi et l'obsédé du sexe. Que pense vraiment Serge de son enfance?? De sa rupture avec BB?? Des multiples polémiques dont ses oeuvres ont été l'objet?? Une promenade freudienne à travers les mots d'esprit d'un serial rockeur à tête de chou, foetus ivre de Chopin, être fascinant, qui a toujours tangué entre la beauté des désastres et le goût de l'infini.

144 pages
Éditions EnVolume


Joseph Agostini est psychologue clinicien, psychanalyste. Il est également dramaturge, auteur de nombreuses pièces jouées à Paris et en Avignon On peut se pendre avec sa langue, Barbarie Land, dipe à la folie...). Audrey Tordelli est journaliste, animatrice (France Bleu) et présentatrice (France 3 Corse Via Stella). Après des études littéraires et un master cinéma, elle travaille entre sa Corse natale et les quatre coins de la France. Gainsbourg sur le divan est son premier livre.


Serge Gainsbourg, est né Lucien Ginsburg en 1928 à Paris dans une famille d'immigrés russes, juifs, peintres et musiciens. Auteur-compositeur mythique. J'aimais le musicien, l'homme un peu moins. La faute certainement à l'image provocatrice et misogyne qu'il aimait à donner.

Avec ce livre et l'écriture à la première personne d'Audrey Tordelli, je découvre l'enfant, l'homme en devenir, à la recherche de sa voie, d'abord la peinture, puis ne se sentant pas suffisamment bon, la musique et la chanson.

« Je suis tombé dans la facilité en chanson, jamais dans la peinture. Elle ne l'aurait pas permis, elle, la reine, l'ogresse des égos, celle qui te dévore en une seule bouchée sans te demander la permission, exit les heures passées sur une toile, la sueur qui perle ton front, la nuit entière à griller les cigarettes parce que tu ne trouves pas le sujet adéquat ou la bonne tournure, elle ne fait pas de cadeau, Madame Peinture, qui avale les talents et recrache tous ceux qui sont impropres à la digestion.
La chanson est tombée comme un gagne-pain et elle l'est restée. C'est facile de faire sonner une note, puis deux, de se balancer sur les mots, de se cogner à eux, puis de rebondir, de les tordre et de les mettre en rimes »...
La première partie de cet essai, écrite par Audrey Tordelli, nous retrace donc la vie de cet écorché vif, à la recherche de l'amour, de la reconnaissance. Souffrant de sa laideur et de son mal-être, enfant mal-aimé, timide, non désiré par une mère à qui il ressemble finalement beaucoup. On le voit démarrer dans le monde du show-bizz avec Le poinçonneur des Lilas.
Les femmes auront une grande place dans sa vie malgré sa misogynie avérée. Car Serge Gainsbourg était aussi un séducteur invétéré, avec une vie sentimentale aussi riche que tumultueuse. Marié deux fois, père de deux enfants, compositeur pour Juliette Gréco, il enchaîne avec une liaison aussi courte que passionnée avec Brigitte Bardot. Puis Jane Birkin, l'amour de sa vie et la naissance de Charlotte. Et son idylle avec Bambou et la naissance de Lucien.

J'ai adoré l'écriture de Audrey Tordelli, j'avais l'impression d'entendre Serge Gainsbourg puis Gainsbarre, ses craintes, ses peurs, ses folies, ses amours et ses si belles chansons. A la lecture des strophes poétiques, les mélodies me trottaient dans la tête.
Cette première partie est prenante, vivante et m'a rendu presque sympathique l'homme que je trouvais vulgaire, provocateur et très ambigu. Cela en était très émouvant.

La seconde partie du livre de Joseph Agostini, psychanalyste, à la deuxième personne du pluriel, nous fait rencontrer l'homme à travers l'analyse à la Freud, l'homme sur le divan.
On descend là vraiment dans les tourments et la psyché de l'artiste.
Cette partie m'a laissée un peu plus imperméable. C'est l’ambiguïté et la notion de perversion de l'homme qui m'a plus gênée. Il est vrai qu'en cherchant aux tréfonds de la conscience de l'homme on peut mieux expliquer les approches et les dérives de l'humain.

En somme très court livre qui a l'avantage de mieux me faire comprendre l'enfant, l'homme que fut Gainsbourg, le pourquoi du comment, et m'a fait retrouver la magie de ses chansons.
Ce qu'on peut lui reconnaître, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas c'est qu'il ne laisse jamais indifférent.

Merci aux Éditions EnVolume et François Sirot de m'avoir fait confiance en me proposant la lecture de cette biographie/essai de celui qui fut un grand nom de la musique française.

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