vendredi 30 avril 2021

La mauvaise herbe (Yves Montmartin)

 




Restée seule au milieu du jardin, la petite fille s’est relevée. Il ne lui reste plus qu’un ou deux mètres de terrain à travailler. Elle se rappelle les paroles de son père : «les mauvaises herbes, il faut les déraciner. Une fois que tu as bien supprimé les racines, la plante ne repousse plus, elle est morte à jamais». Elle ne se doute pas que dans son cœur commence à germer une graine de mauvaise herbe; elle ne sait pas à ce moment précis qu’elle aussi, un jour, elle sera déracinée. D'Alger à la banlieue lyonnaise, ce roman raconte le destin tragique d’une jeune femme algérienne, qui petite fille rêvait d’indépendance et de liberté et qui va se retrouver emprisonnée par le poids des traditions et de la religion.



Qu’est ce qu’une mauvaise herbe : une herbe qui dérange l’ordonnancement d’un jardin, qui étouffe la croissance des plantes utiles. Une mauvaise herbe a le droit elle aussi de vivre, de se nourrir, à son utilité dans le tout. La graine semée germera et pourra aussi avoir son utilité, elle représente la vie et la nature.

Amira, petite fille algérienne de la fin du XXème siècle, est la seule fille de sa fratrie, la petite princesse venue après ses deux frères. Son père en est heureux, la petite est arrivée alors qu’il a déjà deux fils. Le contraire l’aurait-il ravi ? Pas sûr. Le poids de la tradition, des coutumes fait que la mère est plus heureuse de donner un fils à son époux qu’une fille.

Rien de tel pour me révolter. Qui nourrit la graine nécessaire à la vie, qui met au monde, c’est bien la femme. Garçon ou fille, un enfant est l’amour d’une vie.

Petite Amira fera la joie de sa famille, vive, intelligente, ayant le sens de la réparti, on la traitera parfois de mauvaise graine car elle aimerait ressembler à sa tante Nour qui est indépendante et n’a pas voulu se marier.

Amira se liera d’une amitié profonde avec sa petite voisine Loubna, sa sœur, son double. Elles partagent tout, leurs jouets, leurs rêves, leur aspirations profondes, Amira veut être professeur de français, la langue et la littérature de Molière l’attire profondément ; Loubna est douée en dessin et à un sens artistique très prononcé. Les filles adorent lire, s’instruire et approfondir leurs connaissances. C’est le temps de l’insouciance, mais comme les quatre saisons, le temps passe, tout évolue, elles grandissent et il faut déjà penser au mariage et aux enfants.

Trouveront-elles toutes deux le bonheur et l’épanouissement auxquels elles ont le droit et que l’on voudrait imaginer pour elles ?

On le sait, souvent les contes peuvent tourner au cauchemar, et tout cela par ignorance, manipulations, et poids des traditions mais aussi jalousie et méchanceté.

Ce roman est une sorte de livre/journal. Amira en est la narratrice et nous conte sa vie comme un journal intime. L’écriture de Yves Montmartin est douce, vive, bien informée, il nous livre de nombreuses faits sur la vie en Algérie, sur l’évolution du pays, les révolutions qui couvent et la jeunesse en colère. Il nous parle aussi de ses familles qui imaginent que la vie peut-être meilleure ailleurs et qui font croire à ceux qui sont restés au pays que ça l’est. Mais tout cela n’est que façade.

Un roman coup de poing, l’enchaînement des événements en fin de livre m’a fait dire : mais non pas ça.

Émouvant mais surtout bouleversant.

Merci à Yves Montmartin de m’avoir fait connaître son roman, un court roman écrit lors du confinement, mais quel livre !!!!


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